J’ai développé une petite animation pour mes étudiants de l’IUT illustrant le fonctionnement d’un laser à gaz avec une cavité Fabry-Pérot. C’est écrit en langage Processing, et c’est sous licence libre (GNU GPL3). Cette animation permet de montrer les différentes interactions lumière − matière mises en jeu (absorption, émission spontanée, émission stimulée), le rôle de la cavité laser, l’influence de la puissance de pompage et des coefficients de réflexion des miroirs sur la puissance émise par le laser.
Installation
- Téléchargez le code de l’animation (faites un clic droit sur le lien puis choisissez d’enregistrer la cible du lien sous)
- Allez sur la page de téléchargement du logiciel Processing et téléchargez la version pour votre système d’exploitation. C’est un logiciel libre est gratuit, vous pouvez y aller les yeux fermés !
- Il n’y a pas de programme d’installation pour Processing, il suffit de décompresser le fichier zip téléchargé. Lancez le logiciel Processing.
- En utilisant le menu Fichier » Ouvrir…, ouvrez le fichier laser.pde téléchargé plus haut. Processing vous indique que le fichier laser.pde doit être situé dans un dossier nommé laser, et vous propose de créer ce dossier et d’y déplacer le fichier. Il suffit d’accepter en cliquant sur Ok.
- Pour lancer l’animation, cliquez sur la flèche verte (sous Windows, il est possible que le pare feu bloque le lancement de Java. Il faut alors autoriser l’accès).
- Pour fermer l’animation, appuyez sur la touche Échap.
Description de l’animation
Au lancement de l’animation, seul le nuage d’atomes formant le milieu amplificateur est visible. Peu importe la nature de ce gaz ici (il s’agit d’ailleurs souvent d’un mélange gazeux, comme dans le laser hélium-néon ou dans le laser au dioxyde de carbone). Les deux miroirs constituant la cavité Fabry−Pérot ne sont pas encore présents. La puissance de pompage du laser (qui correspond à la quantité d’énergie que nous fournissons au milieu amplificateur par unité de temps) est ici nulle (0% à gauche de l’animation). Il ne se passe rien, aucune lumière n’est émise.
L’animation se contrôle à partir de certaines touches du clavier. Pour afficher la liste de ces touches, il suffit d’appuyer sur la touche « h ». Commençons par augmenter la puissance de pompage du milieu amplificateur jusqu’à 8%, en appuyant sur la touche +.
La puissance de pompage étant non nulle, certains atomes du nuage de gaz vont absorber de l’énergie et passer à l’état excité. Ce sont les disques gris avec un anneau rouge autour. Au bout d’un temps moyen (appelé durée de vie du niveau excité), cet atome va spontanément se désexciter, en émettant un photon (disque rouge) dans une direction aléatoire : l’émission spontanée. Les photons créés par émission spontanée peuvent bien sûr être absorbés par d’autres atomes du gaz (ce n’est pas systématique, il existe une probabilité que le photon soit absorbé par l’atome).
Le dernier effet notable est l’émission stimulée, à l’origine du rayonnement laser. Ce phénomène se produit lorsqu’un photon incident trouve sur son chemin un atome du gaz qui se trouve déjà dans un état excité. Ce photon incident va stimuler (déclencher) la désexcitation de l’atome, qui va émettre un photon qui est une copie parfaite du photon incident. On se retrouve alors avec deux photons parfaitement identiques, se propageant dans la même direction, avec la même énergie (même couleur). Si cette paire de photons rencontre sur son passage d’autres atomes, ils vont déclencher la création d’autres photons identiques. Il s’agit du phénomène en cascade qui est à l’origine du rayonnement laser.
Malheureusement, la direction de propagation de ces photons créés par effet stimulé dépend directement de la direction du photon initial à l’origine de la cascade d’émissions stimulées. Et cette direction est évidemment aléatoire car elle trouve son origine dans une émission spontané. On a donc des bouffées d’émissions stimulées, dans toutes les directions de l’espace, mais l’effet cascade est très inefficace car ces photons quittent rapidement le milieu amplificateur, mettant un terme à l’effet cascade les concernant.
L’idéal serait de maintenir un effet cascade sur une durée très importante afin de générer un maximum de photons par émission stimulée. Ce peut être fait en plaçant le milieu amplificateur entre deux miroirs à la verticale (appuyez sur la touche m pour faire apparaître les miroirs), de sorte que les photons se propageant suivant une direction horizontale puissent, après réflexion sur ces miroirs, traverser à nouveau le milieu amplificateur pour donner lieu à d’autres émissions stimulées.
Le premier miroir possède un coefficient de réflexion R1 de 100% afin de renvoyer tous les photons incidents dans la cavité laser. L’autre miroir a un coefficient de réflexion R2 inférieur à 100% pour qu’un certains pourcentages des photons incidents sur le miroir puissent quitter la cavité laser, et ainsi former le faisceau laser émis.
En l’état actuel, avec une puissance de pompage de 8% seulement (valeur relative complètement arbitraire), le laser ne fonctionne pas, c’est à dire qu’aucun photon ne quitte le laser par la droite, bien que l’on puisse apercevoir par moment des « bouffées » de photons générés par émission stimulée se propageant suivant l’horizontale. Ceci est dû au fait que le gain du laser (c’est à dire la création de photons par effet cascade) n’est pas suffisant pour compenser les pertes du laser (la réabsorption des photons dans le gaz d’une part, et le fait que des photons quittent le laser à cause du coefficient de réflexion de 70%).
On constate donc que, bien que l’on apporte de l’énergie au laser, il n’y a aucune lumière laser à la sortie. Le rendement de 0% n’est franchement pas terrible ! Il existe en réalité un seuil d’oscillation laser. Cela correspond à la puissance de pompage minimale qui va permettre de compenser les pertes dans la cavité. Si la puissance de pompage dépasse ce seuil, le gain dans le laser devient alors supérieur aux pertes, et de la lumière laser sera visible en sortie de cavité.
Montez la puissance de pompage vers 40%, et soyez patients. Vous verrez se construire au fil du temps un ensemble de photons créés par émissions stimulée, se propageant tous suivant un axe horizontal, et à la sortie du laser (sur la droite), les photons constituant le faisceau laser de sortie.
Vous remarquerez également qu’il y a toujours de l’émissions spontanée : en plus du grand nombre de photons constituant la lumière laser, quelques photons sont émis dans des directions aléatoires. Sur la photo ci-dessous montrant un laser hélium – néon ouvert, cette émission spontanée correspond à la lumière couleur saumon que l’on voit dans le tube laser, tandis que la lumière laser est matérialisée par le point rouge visible sur la feuille.
Pour terminer, notez qu’il est possible de modifier le seuil d’oscillation laser en modifiant le coefficient de réflexion du miroir de sortie du laser. En effet, en augmentant le coefficient de réflexion du miroir, cela va diminuer les pertes dans le laser, et l’effet laser pourra être obtenu avec une puissance de pompage plus faible. En revanche, le coefficient de réflexion étant plus élevé, le nombre de photons qui pourra quitter la cavité sera plus faible (un coefficient de réflexion de 90% signifie que chaque fois qu’un photon arrive sur le miroir, il a 1 chance sur 10 de traverser le miroir, et 9 chances sur 10 d’être réfléchi). Dans le cas extrême, avec un coefficient de réflexion de 100%, le laser va fonctionner avec des puissances de pompage très faibles, mais aucune lumière laser ne sera extraite de la cavité laser. Pas vraiment utile ! Il faut donc trouver un compromis sur le coefficient de réflexion R2 entre un seuil d’oscillation laser faible, et une puissance suffisante en sortie de laser.
Il s’agit bien évidemment d’une animation très simpliste. Dans la réalité, les choses sont bien plus complexes, se passent bien plus vite que dans l’animation. L’utilisation de l’aspect corpusculaire de la lumière (photons) permet ici d’illustrer le fonctionnement du laser, mais des effets comme la résonance des ondes lumineuses dans la cavité laser (définissant les longueurs d’onde émises), la diffraction lors de la propagation du faisceau, ou encore la stabilité de la cavité sont complètement occultés. Ça mériterait d’autres animations, mais ce sera pour plus tard…